Les suivis journaliers réalisés à Patuchev ont permis de montrer que la part de fourrages pouvait atteindre plus de 70 % de la ration, quel que soit le système étudié. Quels sont les facteurs permettant de faire ingérer cette quantité de fourrages ? Combien de repas ? Quel niveau de refus tolérer ? Quelles pratiques pour optimiser la production laitière et le temps de travail ?
Les chèvres sont réputées exigeantes sur la qualité des fourrages, ce qui pousse les éleveurs à une attention particulière quant à leur production. La gestion de la distribution de l’alimentation a un impact fort sur l’ingestion et donc sur la valorisation des ressources fourragères. Or la maximisation de la valorisation des fourrages est un enjeu fort tant pour réduire les coûts alimentaires que pour améliorer l’autonomie, notamment protéique, des élevages. Par ailleurs, peu de repères existent pour les éleveurs caprins et leurs conseillers quant à l’impact réel des modalités de distribution sur la valorisation des fourrages, alors que les conséquences sur les résultats technico-économiques et sur la charge et l’organisation du travail peuvent être lourdes.
Une enquête en ligne auprès d’éleveurs et de conseillers (160 répondants) a montré qu’il est généralement considéré qu’augmenter la fréquence des distributions permet d’augmenter l’ingestion et la production et qu’aucun consensus ne se dégage sur l’ordre de distribution idéal de deux fourrages en fonction du contexte.
Ainsi, plusieurs essais ont été réalisés entre 2022 et 2023, à INRAE et la station du Pradel, pour déterminer les impacts des modalités de distribution des fourrages sur leur valorisation par la chèvre laitière :
La synthèse montre que le nombre de distributions n’a eu aucun impact sur la quantité de fourrage ingérée et la production laitière, quelle que soit la nature des fourrages utilisés. Concernant l’ordre de distribution, les chèvres ingèrent globalement 53 % d’un fourrage en plus lorsqu’il est distribué le soir plutôt que le matin, en cohérence avec le temps d’accès à l’auge plus long. Selon les essais, la part du fourrage préféré dans la ration fourragère a varié de 53 % à 89 %, les chèvres ayant fortement modifié leur comportement d’ingestion en fonction des écarts de préférence entre les fourrages proposés. Aucune loi générale ne peut être donnée pour l’effet de l’ordre sur l’ingestion totale, la composition de la ration et la production laitière, qui ont varié selon la préférence relative et la valeur nutritive des deux fourrages distribués. Cependant chaque essai a permis d’illustrer les différents impacts possibles en fonction de différentes combinaisons de fourrages.
Intervenant.e.s : Bertrand Bluet (Institut de l’Elevage), Rémy Delagarde, Romain Guyard et Quentin Niort (INRAE), Rémi Couvet (Eillyps), Valérie Dufourg (Chambre d’Agriculture du Lot)