Le Grand Ouest est un territoire majeur pour la production caprine, représentant près de la moitié de l’effectif national de chèvres et 58 % du lait livré en France (Idele, 2018). Derrière un bassin de production historique et traditionnel, anciennement le Poitou-Charentes, toujours leader national de la production laitière (40 %), se positionne la région Pays de la Loire avec 15,6 % des volumes produits (Idele, 2018). La région Bretagne est quant à elle un bassin de production récent et en développement avec 3 % de la production laitière.
Retrouvez l’intervention réalisée lors du séminaire final du PSDR Flèche
Dans le cadre du projet FLECHE, la recherche de durabilité pour les systèmes caprins en Bretagne s’oriente vers l’amélioration de l’autonomie alimentaire en augmentant la part d’herbe dans la ration. En effet, les systèmes caprins français ont une faible autonomie alimentaire par rapport aux bovins (61 % en caprin vs 88 %). Le poste « alimentation » représente ainsi 41 % de leurs charges d’exploitation. En couvrant les besoins énergétiques et protéiques d’abord par des fourrages, la part des concentrés dans la ration diminuerait. Et lorsque les achats de ces concentrés sont plus faibles, produire du lait devient plus économique et la rémunération du travail de l’éleveur meilleure. Le fourrage le moins couteux à produire est l’herbe.
L’étude s’est portée sur la région de Bretagne car : i) c’est un bassin de production récent, porté par une offre croissante en lait conventionnel et sous label agriculture biologique ; ii) elle possède un climat très favorable à la pousse de l’herbe de par sa pluviométrie importante tout au long de l’année (130 jours de pluie/an) et une tradition de culture de l’herbe et de systèmes herbager importante ; iii) une grande diversité de systèmes d’alimentation. Cette étude permettait ainsi d’améliorer la connaissance autour de la conduite alimentaire et fourragère de ces « nouveaux » systèmes caprins bretons et d’établir des références. L’objectif principal de cette enquête était ainsi de réunir des informations sur les perceptions et pratiques des éleveurs vis-à-vis des fourrages à base d’herbe.
Cette étude a été ainsi menée en développant une approche par enquêtes qualitatives, basées sur des entretiens semi-directifs en face-à-face, explorant les pratiques des éleveurs caprins bretons. Ainsi une grande variété de systèmes et d’éleveurs a été recherchée pour identifier et recruter les enquêtés, se basant sur les connaissances des élevages suivis par la Chambre d’Agriculture de Bretagne.
Dix-sept éleveurs caprins bretons ont été enquêtes. Les systèmes enquêtés sont représentatifs de la filière bretonne à l’exception de l’absence du système maïs-ensilage dans l’échantillon, n’étant pas en adéquation avec les objectifs de cette étude. Ainsi six catégories de fourrages à base d’herbe ont été dénombrés dans les enquêtés, en distinguant les fourrages conservés : le foin, l’ensilage et l’enrubannage ; et les fourrages d’herbe offerts aux caprins et récoltés « en vert » : l’affouragement en vert, de déshydraté de luzerne en brins longs et le pâturage.
Dans l’échantillon enquêté, les fromagers possédaient en moyenne 108 chèvres avec une production annuelle de 691 L/chèvre, et les livreurs 348 chèvres avec une production annuelle de 919 L/chèvre. Les éleveurs enquêtés étaient tous spécialisés et autonome en fourrage, et la majorité d’entre eux n’étaient pas issus du milieu agricole (13/17) et possédaient un parcellaire morcelé ou non accessible du bâtiment (11/17).
Les atouts et inconvénients de l’herbe dans les systèmes caprins ont été étudiés à partir de 17 entretiens auprès d’éleveurs caprins installés en Bretagne. En comparaison des arguments bibliographiques recueillis, les éleveurs bretons insistent davantage sur la charge de travail, la pénibilité de la distribution des fourrages et l’impact du climat sur la production de fourrages à base d’herbe.
Les cinq principaux systèmes d’alimentation que nous avons étudiés en Bretagne sont : affouragement en vert et ensilage, pâturage et foin, foin et enrubannage, ration sèche puis luzerne déshydratée (brins longs). Ils sont mis en place en fonction des objectifs des éleveurs.
Nourrir les chèvres à l’herbe ne signifie pas forcément les mettre au pâturage, les fourrages à base d’herbe sont très diversifiés. Les avis des éleveurs diffèrent à propos des avantages de ces fourrages à base d’herbe, cependant ils sont tous en accord à propos des contraintes de mise en œuvre.
Les éleveurs construisent leurs système d’alimentation en fonction de leur objectifs économiques, de recherche d’autonomie alimentaire, leur volonté d’une meilleure organisation ou d’une simplicité de leur travail mais aussi en fonction de leur expérience et de leur système d’exploitation. Les éleveurs expérimentés se basent aussi sur leurs acquis et leurs connaissances des fourrages qu’ils ont expérimenté, dans leurs conditions (conditions pédoclimatiques locales et avec leur équipement). Les déterminants de la mise en place des systèmes d’alimentation, identifiés par l’étude, permettront aux conseillers d’avoir des informations pour accompagner les éleveurs dans le choix de leur système d’alimentation.
Partenaires et remerciements Nous remercions l’ensemble des éleveurs enquêtés dans ce projet ainsi qu’Emmeline Beynet, stagiaire à l’époque, ayant réalisé cette enquête.
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